Au fil des réformes, la liste et le traitement des facteurs de risques professionnels ont fait l’objet de plusieurs modifications, que ce soit au titre des obligations règlementaires ou pour la prise en compte de la pénibilité.
C’est en particulier le cas de la manutention manuelle et des postures contraignantes, qui avaient disparu de la liste des facteurs de risques ouvrant des droits au titre du compte professionnel de prévention (C2P).
Le projet de réforme des retraites avancé actuellement par le gouvernement contient des propositions pour limiter ces risques, principalement par la prévention.
Compte tenu du poids des débats autour de ce projet dans l’actualité, ces risques sont (re)mis en avant.
Le point à date, et en chiffres.
1. La mise en place du compte pénibilité
La loi du 20 janvier 2014 a mis un place un compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P), prévoyant la possibilité pour les salariés exposés à au moins un facteur de risques (parmi 10) au cours de leur carrière de bénéficier soit d’une formation professionnelle, d’une réduction du temps de travail à salaire identique, ou d’un départ à la retraite anticipé.
Ces 10 facteurs de risques sont :
- Trois facteurs liés au rythme de travail :
o Travail de nuit
o Equipes alternantes (travail posté)
o Travail répétitif
- Quatre facteurs liés à l’environnement :
o Milieu hyperbare
o Bruit
o Températures extrêmes
o Agents chimiques dangereux
- Trois aux liés aux contraintes physiques :
o Manutentions manuelles de charges
o Postures pénibles
o Vibrations mécaniques
Le financement de ces mesures était assuré par un fonds de pénibilité tirant ses ressources de nouvelles cotisations patronales :
Sur les salaires brut des salariés exposés (0,1% pour une exposition à un facteur de pénibilité, 0,2% pour deux ou plus).
Sur la masse salariale de l’ensemble des entreprises privées quelque soit le nombre de leurs salariés exposés (0,01% prévu en 2017).
Une étude de CEO-Rexecode datant de janvier 2016 et s’appuyant sur des statiques de la Dares a estimé que :
3,3 millions de salariés pouvaient bénéficier de ces mesures
Les charges du fonds pourraient atteindre 0,6 Mds d’€ en 2021, 2Mds d’€ en 2030 et 6,3 Mds d’€ en 2060, alourdissant le coût du travail de manière significative.
2. La réforme de décembre 2017
En septembre 2017, le C3P est transformé en compte professionnel de prévention (C2P).
En décembre 2017 un décret écarte 4 facteurs de risques ouvrant des droits au titre du C2P :
la manutention manuelle de charges, les postures pénibles, les vibrations mécaniques et l’exposition aux risques chimiques.
De plus, la gestion et le financement du C2P sont désormais assurés par la branche AT/MP de la sécurité sociale, se substituant ainsi au fonds de pénibilité.
La manutention manuelle générant un grand nombre de déclarations, les conséquences de sa disparition du dispositif sont importantes :
- D’une part les cotisations patronales au titre de la pénibilité sont fortement réduites, à 0,03% en 2021 (réduit à 0,02% en 2022) sur l’ensemble de la masse salariale des entreprises privées, soit c. 183 M€ en 2021. De plus, il n’y a plus de modulation du taux selon le nombre de salarié déclarés.
- Le nombre de salariés déclarés annuellement a fortement chuté, d’une moyenne de c. 900 000 en 2016 et 2017 à c. 660 000 depuis 2018.
D’après la branche AT/MP, c. 19 000 salariés ont fait valoir leur droit (sur 1,9 million de comptes ouverts, soit 1%), dont 61% au titre d’un départ à la retraite anticipé.
Ces modifications du périmètre et de la tarification n’ont probablement pas incité les entreprises à renforcer la prévention des risques liés à la manutention manuelle, dont le poids dans les dépenses a continué d’augmenter.
3. Le projet de réforme des retraites de 2023
Un grand nombre de dispositions sont introduites dans le projet de réforme des retraites actuellement porté par le gouvernement.
Nous nous focaliserons ici sur celle qui concerne la manutention manuelle, les postures contraignantes et les vibrations, qualifiés de risques ergonomiques.
S’il n’est pas envisagé de les réintégrer dans les facteurs de risques ouvrant des droits au titre du C2P, il est prévu la création d’un fonds d’investissement contre l’usure professionnelle.
L’accent est donc mis sur la prévention de ces 3 risques :
- Les entreprises auront l’obligation d’identifier les métiers exposés à ces 3 risques.
- Sur ces bases, le fonds aura notamment vocation à co-financer les actions de sensibilisation et de prévention, de formation, de reconversion professionnelle et de prévention de la désinsertion professionnelle des salariés exposés à ces 3 risques.
Cette disposition s’inscrit dans règlementation actuelle en matière de prévention des risques professionnels (articles L4121-1 et suivants, et L4161-1).
Il est prévu que ce fonds soit doté de 1 Mds d’€ jusqu’en 2027 (soit en moyenne 200 M€ par an), et qu’il soit financé et géré par la branche AT/MP.
La branche étant excédentaire, il n’est pas prévu d’augmenter les cotisations patronales pour assurer ce financement (a).
Notons que le fonctionnement, les conditions de participation et les modalités d’identification des métiers soumis à ces risques ne sont pas encore connus, devant être fixés par décret ultérieurement.
A la date de rédaction de cet article, il n’est pas certain que cette proposition soit celle qui sera définitivement adoptée.
Néanmoins, elle permet de mettre en lumière la nécessité de renforcer la prévention de ces risques.
En effet, avec le travail de nuit ou posté, les contraintes physiques telles que la manutention manuelle, les postures contraignantes et les gestes répétitifs sont les facteurs les importants en termes d’exposition des salariés. Ils sont logiquement les plus générateurs d’arrêts de travail et de maladies professionnelles, en nombre comme en dépense.
Chez ZC Santé, nous combinons l’expertise d’ergonomes et de formateurs pour prévenir les risques liés à l’activité physique, grâce à un accompagnement individualisé de vos collaborateurs. Découvrez notre approche et nos offres.
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